Il n'y a pas de faute d'orthographe dans le titre, que j'aurais du plutôt écrire ΗΕΛΛΑΣ : c'est bien de la Grèce que je veux parler. Un des premiers posts de ce blog traitait déjà de la crise qui secouait ce pays. Il est intéressant de regarder quelle a été l'évolution depuis.
Hélas, cette fois, bien hélas : elle n'a été que conforme aux craintes qu'on pouvait en avoir. Comme je l'exposais déjà à l'époque, la crise de l'endettement est un pari sur l'avenir qui a échoué, parce qu'on a anticipé des dépenses qu'on avait en réalité pas le droit de faire, simplement parce que les prévisions de croissance des revenus n'étaient pas au rendez vous. On peut chercher des coupables, mettre ça sur le dos des banques, du capitalisme, du système financier international, la réalité est là : quel que soit le coupable, les Grecs ont dépensé plus que ce qu'ils avaient droit, ils se sont endettés en pensant pouvoir rembourser, et ça n'a pas été le cas. Ses taux de croissance insolents des dernières années n'était que de la poudre aux yeux, ils sont en train d'être compensés par une récession tout aussi vertigineuse. Alors on aurait peut être pas dû leur prêter autant. On ne les aide pas en faisant flamber leur taux d'interêt à cause de la dégradation de leur note par les agences de notation. Certes, mais en quoi cela les aiderait-il plus de les laisser creuser encore plus leur déficit, en leur consentant des taux d'interêt aussi bas que ceux auxquels ils étaient habitués? et qui pourrait promettre à des prêteurs actuels que prêter à la Grèce est sans risque pour leur argent ? la purge est amère, mais personne n'a d'autres solutions. Le mal est fait, et il faut payer.
Alors qui va payer ? eh bien, manifestement et comme on pouvait un peu s'y attendre, un peu tout le monde. Les banques qui s'apprêtent à renoncer à 50 à 60 % de leur crédits. Les Grecs victimes de plan d'austerité drastique, auquel ils n'arrivent pas à se résigner. Les contribuables européens qui devront consacrer une part de l'argent de leur état à renflouer la Grèce. On peut estimer que c'est en réalité un racket et que nous payons pour eux, mais nous n'avons pas le choix, une vraie faillite serait encore pire.
La Grèce est un petit pays de l'UE. Son PIB annuel ne représente que 1,5 % de celui total de l'Union Européenne. Et même si la dette représente 142 % de ce PIB, son poids sera peut être supportable sans conséquence dramatique pour l'économie des pays de l'Union. Mais le problème n'est pas là. Il est : sommes nous, oui ou non, capables de voir que la Grèce n'est que le canari dans la mine, celui qui donne l'alerte en perdant conscience quand le taux de gaz délétères devient dangereux pour les humains ? comprenons nous réellement l'origine de cette crise et à quel point elle pourrait être archétypique des crises du futur ?
Derrière la Grèce, viennent l'Espagne, l'Italie, et pas très loin la France. Tous ces pays ont des endettements dangereusement croissants, leur note est dégradée ou en passe de l'être. Plus personne ne croit à la note "AAA" de la dette française. Or que nous promet-on pour faire face à cette menace? toujours les mêmes recettes, à droite comme à gauche, dans la campagne électorale qui s'annonce : relancer l'économie, relancer la croissance. Bon mais qu'est ce qui va arriver si l'économie ne redémarre pas? qu'est ce qui peut arriver d'AUTRE que ce qui s'est passé en Grèce ? et cette fois, avec ces poids lourds de l'Union européenne, un défaut de paiement (puisque c'est bien de cela qu'il s'agit) serait ingérable. Or, personne ne traite vraiment de la menace réelle sur la croissance, que nous avons maintes fois rappelée : la production pétrolière ne croit plus ou presque, l'AIE tire encore une fois la sonnette d'alarme . Oubliez l'injustice des marchés financiers, oubliez la bourse, oubliez la démondialisation, ces problèmes existent et sont réels, mais ce ne sont pas eux qui menacent réellement la croissance mondiale. C'est simplement que la machine thermoindustrielle est arrivée au bout de sa phase de croissance de consommation de carburants, que le moteur hoquète, que les tuyaux commencent à donner de moins en moins. Ca ne se manifestera pas par des pompes à sec ou un manque de plastique. Ca se manifestera, bien plus prosaiquement, par un manque de croissance et donc finalement un manque d'argent. Non, les investissements ne redémarreront pas avec une économie en panne. Ce qui va arriver, c'est simplement un assèchement des capacités financières qui se répercutera en cascade sur tous les domaines de la société. Il n'y a pas de recette miracle collective : il y aura simplement des individus qui s'en tireront plus ou moins bien suivant leur flair et leur capacité de comprendre la situation. A titre individuel, les recettes ne sont pas très compliquées : éviter les investissements hasardeux, les emprunts non indispensables, ne pas se fier aux placements miracles, essayer au maximum de maîtriser ses dépenses futures (pas d'emprunt indexés sur des indicateurs pouvant flamber comme le franc suisse !), bien sûr tenter de réduire ses dépenses obligatoires comme les dépenses énergétiques. Le monde ne s'écroulera pas non plus en quelques mois, mais chacun doit adopter le comportement d'un capitaine de navire qui sait qu'il va croiser un ouragan, tout arrimer soigneusement, réduire la voilure, et s'en remettre à la Providence pour que tout se passe sans trop de mal ...